L'héritage classique est l'objet, c'est un affligeant poncif, d'une entreprise d'éradication de l'enseignement, au moment où dans le monde l'accent est mis sur la culture et la diversité de l'éducation, genre soft power , que pourraient incarner chez nous les Humanités. C'est surtout l'héritage romain qui nous apostrophe : n'avons-nous pas en effet la connaissance du legs grec que parce qu'il a transité par Rome ? Et quand les Grecs ne cessent de s'interroger sur ce qui les distingue entre eux et des autres, Rome atteint à un rôle universel par une empreinte sur les institutions, la politique, le droit, la religion, la morale, les moeurs, induisant une vision de l'homme qui dépasse l'horizon et le projet individuels. Comme le dit Pierre Grimal « rien de ce qui nous entoure n'aurait été ce qu'il est si Rome n'avait pas existé ». Cet héritage s'exprime en particulier dans la banque de données et de références qu'est l'Histoire romaine, substrat des Humanités car elle a le mérite d'évoquer ce qui a eu lieu. Il y a de multiples manières d'écrire l'histoire, même si le passé, qui est aboli, ne peut qu'être évoqué. Parmi les productions qu'il suscite, le roman policier historique est un protagoniste inattendu, qui s'impose comme une modalité importante des récits du passé : il attire des lecteurs, alors que la lecture en général semble en perte de vitesse. Je voudrais m'arrêter sur le cas du roman policier historique qui met en scène l'Antiquité romaine, le « polar romain » : comment les rapports qu'entre-tient ce genre fictionnel avec l'histoire romaine peuvent-ils contribuer à reconfigurer nos relations avec les Humanités ?