La lettre, lien vers l’Autre dans la correspondance de Paul Gauguin
Abstract
Paul Gauguin’s letters are a privileged space for expressing his resentment towards Europe, which is full of all its flaws. At the same time, they serve as a platform for spreading his fantastical indigenous identity, responding to the feeling of his difference and the desire to flee the old continent to regain creative vitality. This obviously goes hand in hand with an exaltation of outlying cultures and then, once in Polynesia, exotic landscapes, ancestral habits and local life-styles. On the spot, the artist also deplores the harmful effects of colonization, particularly the disappearance of traditional art. Therefore, in a context of stigmatization of the native people and their productions, the correspondence gives voice to a detonating voice in the dominant discourse convinced of the superiority of Europe and its right to destroy the singularity of the foreigner. His letters finally bear witness to the blossoming of an innovative aesthetic, favoured by distance, nourished by the virginity of Elsewhere, far from the narcissistic codes of acade-
mism. Thus, across the oceans and in the face of euro-centrism, the correspondence intends to convey the voice of the Other, of the Savage.
Les lettres de Paul Gauguin constituent un espace privilégié d’expression de son ressentiment envers l’Europe, chargée de toutes les tares. Parallèlement, elles tiennent lieu de tribune pour diffuser son indigénisation fantasmatique, répandant le sentiment de sa différence et le désir de fuir le vieux continent pour recouvrer la vitalité créatrice. Cela va évidemment de pair avec une exaltation des cultures excentrées puis, une fois en Polynésie, des paysages exotiques, des habitudes ancestrales, des modes de vie locaux. Sur place, l’artiste déplore aussi les effets néfastes de la colonisation, notamment la disparition de l’art traditionnel. Dès lors, dans un contexte de stigmatisation de l’indigène et de ses productions, la correspondance laisse entendre une voix détonante dans le discours dominant convaincu de la supériorité de l’Europe et de son droit à détruire la singularité de l’étranger. Ses lettres témoignent enfin de l’éclosion d’une esthétique innovante, favorisée par l’éloignement, nourrie à la virginité de l’Ailleurs, loin des codes narcissiques de l’académisme. Ainsi, par-delà les océans et face à l’européocentrisme, la lettre entend transmettre la voix de l’Autre, du Sauvage.