Texte introductif. La F/francophonie dans l’aire indiaocéanique : singularités, héritages et pratiques
Résumé
S’interroger sur la spécificité d’une aire géographique et culturelle implique une réflexion sur ses caractères communs et sur leur singularité dans un ensemble plus vaste. La F/francophonie1 dans l’aire indiaocéanique2 interroge ainsi les caractéristiques principalement îliennes (les Comores, Mayotte, Madagascar, île Maurice, La Réunion, Rodrigues et les Seychelles) et plus globalement maritimes (Djibouti, Pondichéry, Karikal, Mahé, Yanaon et Chandernagor) qui la composent. Elle sonde également les héritages à mettre en lien avec une colonisation française3 s’étirant du XVIIe siècle au XXe siècle qui s’inscrit dans une lutte d’influence, particulièrement avec la Grande-Bretagne4. Elle met surtout en évidence des singularités sociales et culturelles qui portent en elles des enjeux linguistiques complexes d’un point de vue fonctionnel. Loin de vouloir figer et réifier une identité culturelle spécifique aux différentes régions de l’océan Indien5, le propos vise à présenter des perspectives critiques mêlant tout à la fois le poids de certains héritages et l’évolution sémantique de la notion de F/francophonie. Au-delà de considérations purement lexicales, une approche comparative et évolutive suppose de tenir compte de processus historiques qui contribuent à ajuster le sens des mots dans des pratiques sociales complexes par lesquelles transite la production de sens autour de cette notion. C’est tout l’intérêt de la portée heuristique de l’histoire en ce qu’elle permet de faire sens des différences et des écarts avec le présent et d’inscrire l’étude de la F/francophonie dans un processus dynamique et complexe. La notion de F/francophonie diffère ainsi en situation coloniale et postcoloniale. L’inscrire dans un temps long facilite une analyse processuelle qui tourne le dos à un présentisme à valeur universelle.