Pape moe de Paul Gauguin : récit viatique et œuvre plastique en résonance
Résumé
Betwen 1893 and 1894, when artist Paul Gauguin returns to Paris at the end of his first stay in Tahiti, he executes four works resuming the same motive : a native girl drinking to a spring. This is an extract from his journey diary, Noa Noa, and three plastic works, a watercolor, an oil on canvas and a carving. With the same title Pape moe (Mysterious water) and different ways of expression, these four mediums suggest the phantasmagorical construction of a shady and imperceptible scenery, populated with indefinite creatures, where may appear the vision of an ambiguous, even monstruous, woman. In the late 19th century, when the terror of the « vamp » is at its height, counterbalancing the myth of the accomodating Tahitian woman, the male gaze is visibly reduced to this fleeting observation of the « belle-des-îles », perceived in her impassable alterity.
Entre 1893 et 1894, de retour à Paris à l’issue de son premier séjour à Tahiti, l’artiste Paul Gauguin exécute quatre œuvres reprenant le même motif : une jeune fille indigène s’abreuvant à une source. Il s’agit d’un extrait de son carnet de voyage, Noa Noa, et de trois productions plastiques, une aquarelle, une huile sur toile et un bas-relief, portant le même titre Pape Moe (L’Eau mystérieuse). Sur des supports différents et avec des moyens d’expression distincts, ces quatre compositions suggèrent la construction fantasmagorique d’un décor trouble, insaisissable, peuplé de créatures indéterminées, apte à accueillir la vision d’une femme ambiguë, voire monstrueuse. En une fin de siècle où la terreur de la « femme fatale » est à son apogée, contrebalançant le mythe de la vahiné complaisante, le regard masculin se borne ici à cette fugace observation d’une belle-des-îles, ramenée à son infranchissable altérité.