, revendication d'une foule, d'un peuple et non seulement la sienne. Prospero n'est pas que « son maître », c'est le colonisateur : « L'homme devient chaque jour plus exigeant et plus despotique, p.36

, est pourquoi il généralise ses propos dans son réquisitoire final : « Tu resteras, comme ces mecs qui ont fait les colonies et qui ne peuvent plus vivre ailleurs

, Les tâches imposées à Caliban sont multiples : la prise de conscience n

, Césaire sait de quoi il parle ; il a connu lui-même l'indifférence des siens : « Cette ville inerte, cette foule à côté de son cri de faim, de misère, de révolte, de haine, cette foule si étrangement bavarde et muette. » 10 La masse ne s'insurge pas, ne se révolte pas ; ce n'est pas qu'elle soit satisfaite de son sort, mais des décennies d'asservissement l'ont menée à la résignation, au manque de confiance en soi : « Un sous-développé

, La pièce de Césaire apparaît alors chargée d'une triple fonction : volonté de battre en brèche les lieux communs concernant les Noirs chez les Occidentaux ; volonté de sortir de leur apathie, de leur fatalisme, les frères opprimés, convaincre les inconscients ; mais aussi et surtout, rendre dynamique leur énergie potentielle : enflammer les foules. Ce théâtre doit se traduire par un passage à l'action : il concerne les Noirs aussi bien que les Blancs, Ariel est du type de l'ancienne négritude : « C'était un très bon nègre, la misère lui avait blessé poitrine et dos et on avait fourré dans sa pauvre cervelle être qu'une fatalité pesait sur lui

C. Théâtre-shakespearien,

, Ce dernier point peut sans doute nous éclairer : il nous explique la divergence entre les deux pièces, ne serait

, entité ; il est Prospero et personne d'autre, il a sa personnalité propre. Par contre, ce serait probablement une erreur de rechercher, chez Césaire, une psychologie des personnages dans Une tempête, chaque caractère représente un type d'individu, une collectivité, p.88

A. Césaire and . Cahier, , vol.11, p.85

. Ce and . Qu, ont brandi les athlètes noirs américains aux Jeux olym-On peut sans doute déceler un certain manque de finesse psychologique -qui découle de la remarque précédente -chez les personnages, mais Césaire n'a pas le temps de se perdre en subtilités : l'avenir d'un continent, d'une race, est sa en jeu ; il lui faut saisir le spectateur, le frapper, le harceler pour qu'il en prenne conscience, et notamment par un rythme souvent violent, un style agressif, mais poétique aussi : « La nuit, la toute voyante aveugle, la toute flaireuse sans naseaux

, Pour lui, la période coloniale est arrivée à son terme ; la pièce proclame la fin d'une époque, celle imposée par Prospero et annonce l'apparition d

, Une tempête, le théâtre lui-même est démystifié avec l'apparition du meneur de jeu ; la pièce est influencée par d'autres moyens d'expression : l'utilisation du retour en arrière

, évoluent des personnages antagonistes blancs et noirs. L'atmosphère est celle de la situation coloniale : le héros principal est toujours un Noir, qu'il ait le pouvoir (Christophe, Lumumba) ou non (1e Rebelle de Et les chiens se taisaient et Caliban)

, recours systématique à une inspiration d'origine africaine ; courante dans sa poésie, celleci s'affirme dans son oeuvre dramatique : ici, ce sont les esprits des forêts, l'apparition du dieu Eshu, l'évocation de Shango. Le langage des personnages est différent, lui aussi, selon qu'ils sont blancs ou noirs (l'usage des proverbes -« Chacun entend son tambour

, Conclusion La pièce de Shakespeare étant une adaptation, il était à craindre qu'elle présentât les défauts propres à ce genre d'entreprise, que la « shakespearienne carcasse » 13 reste trop apparente et donc gênante, 1968.

G. Sandier and . La-tempête-d'aimé-césaire,

, Césaire a voulu en changer le sens ; s'il garde l'intrigue shakespearienne, c'est qu'elle lui permet de remettre en cause la domination d'une civilisation occidentale sur les peuples du tiers-monde ; il substitue au télescopage des différentes étapes du processus faute/expiation/pardon, celui des phases successives de la situation coloniale

. Dans-le-cadre-de-l'oeuvre-dramatique-d'aimé-césaire, cette pièce représente un élargissement hors des limites historiques qui étaient celles de La Tragédie du roi Christophe et d'Une Saison au Congo, ancrées dans des situations précises par les dates et par les lieux. Transcendant les situations particulières, Césaire, par la confusion volontaire des époques, suggère dans Une tempête, que le problème central s'est posé, se pose et se posera encore : il souhaite, par là même

B. Oeuvres-d'aimé-césaire, «. Cahier, ;. Ferrements, and L. Seuil, Les Armes miraculeuses, Gallimard, 1946. « Discours sur le colonialisme », Présence africaine, 1953. « Et les chiens se taisaient », Présence africaine, 1939.

C. «-aimé, Littérature africaine, vol.9

. Delas-d, Aimé Césaire ou le verbe parturiant, Hachette supérieur, Poètes d'aujourd'hui, p.5, 1962.

. Kesteloot-l.-et and . Kotchy-b, Aimé Césaire, l'homme et l'oeuvre, 1973.

. Ngal-g, Aimé Césaire, un homme à la recherche d'une patrie, Présence africaine, 1994.