, Enfin l'attitude utopienne d'agnosticisme religieux, qui rappelle le thème paulinien du « Dieu inconnu », prépare la réception de cette Révélation chrétienne : les Utopiens disent ignorer si leur religion est la bonne et supplient Dieu de les éclairer. Il n'existe donc aucune contradiction entre les lumières de la raison naturelle, qui les a guidés jusqu'ici, et celles de la Révélation qu'ils s'apprêtent à accueillir et dont l'imprimerie sera le vecteur ; est-il besoin de souligner l'actualité de ces détails à l'orée de la christianisation missionnaire du Nouveau Monde ? 15 Le sens de l'échange est cependant réversible, non plus de l'Europe à l'Utopie mais de l'Utopie à l'Europe. Médiateur entre les deux mondes, Raphaël ne se borne pas à apporter au Nouveau la langue et les lettres grecques plus la Révélation chrétienne, Mais l'émergence du Livre est elle-même dans un rapport étroit avec l'aspect peut-être le plus essentiel de l'action de Raphaël en Utopie, qui est religieux : c'est lui qui y apporte « le nom du Christ, sa doctrine, sa vie, ses miracles, l'admirable constance de tant de martyrs, dont le sang volontairement versé a soumis sous la loi de l'Evangile la plupart des nations de la terre, p.183

. C'est, ce qui reviendrait à valider implicitement le principe du « sacerdoce universel » qui sera celui de la Réforme. A cette constitution d'une Eglise autocéphale canoniquement discutable, More oppose l'action missionnaire classique, théologiquement plus orthodoxe, en relatant dans sa lettre-préface à Pierre Gilles les démarches entreprises par un pieux théologien qui, assure-t-il, aurait sollicité du Souverain Pontife le titre d'évêque de l'île d'Utopie afin d'aller évangéliser ses habitants (éd, aux modalités canoniques de la diffusion du christianisme dans les terres lointaines que renvoient les débats des Utopiens sur la possibilité d'ordonner eux-mêmes des prêtres, p.350

C. Le-sujet-de-la-lettre-de and J. , Busleiden à Thomas More qui sert de postface à l'édition de 1518 (éd, pp.634-642